inventaire et valorisation du patrimoine de bretagne
Vitrail représentant la bataille d'Autours dans la basilique Notre-Dame-de-Bon-Secours à Guingamp (Côtes d'Armor) © Région Bretagne

Durant sept mois, entre juillet 1870 et janvier 1871, un conflit armé oppose la France à la Prusse. Lors de la déclaration de guerre, le 19 juillet, personne ne doute de la puissance de l’armée impériale. Elle est néanmoins malmenée dès les premiers affrontements et s’effondre à Sedan le 2 septembre 1870, entraînant, avec elle, la chute de l’Empire. L’ennemi déferle vers Paris et l’assiège. Un gouvernement de Défense nationale organise la résistance et mobilise en masse pour pallier l’anéantissement de l’armée régulière. Le 28 janvier 1871, l’armistice met fin à cinq mois de siège mais déclenche l’insurrection de la Commune. En mai, un traité de paix entérine la victoire allemande.

 

Fusilier marin du monument commémoratif de la guerre 1870-1871 à Quimper (Finistère) (c) Ville de Quimper
Fusilier marin du monument commémoratif de la guerre 1870-1871 à Quimper (Finistère) © Ville de Quimper

Malgré les très nombreux morts, des avancées étonnantes dans le domaine des sciences, des techniques, des idées, avant d’être étouffée par les deux conflits mondiaux du 20e siècle, l’histoire de la guerre de 1870-1871 a été éclipsée par la honte de la défaite et les polémiques à l’égard des autorités civiles et militaires. C’est pourtant l’une des premières guerres à être rapportée par ses acteurs et non seulement par l’historiographie du pouvoir.

Même s’il n’y eut pas de combat en Bretagne, le cent-cinquantième anniversaire de cet événement est l’opportunité de collecter, recenser, documenter et mettre en lien les traces qui existent sur le territoire, et de partager cette mémoire. À l’occasion des Journées européennes du patrimoine 2020, la Région Bretagne a organisé, en partenariat, plusieurs événements autour de cette histoire : visites, conférences, projection de film, etc.

 

 

En plus de ces rendez-vous, le service de l’Inventaire a élaboré une carte interactive des lieux/objets témoins recensant des éléments, souvent discrets, peu connus, qui témoignent aussi de cette histoire oubliée. Aussi souvent que possible, les points sont rattachés à des dossiers d’Inventaire. Cette carte se complète au fur et à mesure de la découverte de nouveaux lieux ou de l’apport de nouvelles connaissances. N’hésitez pas à apporter votre propre pierre à cette cartographie !

 

Voir en plein écran

 

Témoignage d’évolutions sociétales majeures, le conflit franco-prussien est l’une des premiers pour lequel des monuments sont édifiés en mémoire des sacrifiés. S’il y en a dans chaque préfecture, il arrive qu’ailleurs on ajoute quelques décennies plus tard ces noms à ceux de la boucherie de 1914-1918 (Le Theil-de-Bretagne 35, Ploemeur 56…). Plus modestement, on installe des tableaux commémoratifs dans les églises (Dingé 35…) ou dans les lycées (Saint-François-Xavier à Vannes…). À l’inverse, parfois c’est l’Histoire qui gomme ces traces, comme à Lorient, où il faut deviner sur le socle de l’emblématique colonne Bisson, les traces des stèles disparues lors des bombardements de 1943.

 

Statue du général Le Flô (1804-1887) à Lesneven (Finistère) © Région Bretagne
Statue du général Le Flô (1804-1887) à Lesneven (Finistère) © Région Bretagne

Un travail de mémoire collaboratif

Hormis quelques tombes remarquables ou à Lesneven la statue du général Le Flô, ministre de la guerre du Gouvernement de la défense nationale, peu de monuments sont consacrés aux protagonistes du conflit : aucun monument pour Emile de Keratry, général de l’armée de Bretagne ou pour Louis-Jules Trochu, chef du gouvernement de la Défense nationale, tous deux bretons mais dont seules les rues de quelques préfectures ont gardé la mémoire. Un monument en revanche à Fernand de Langle de Cary à Pont-Scorff (56) dont l’Histoire garde surtout la mémoire de son engagement pendant la Première Guerre mondiale. Dans de nombreux cimetières, des tombes sont sauvées de l’anonymat ou de l’oubli par des associations ou érudits locaux.

 

Les traces les plus émouvantes du conflit relèvent le plus souvent d’initiatives privées : ex-votos et autres objets sont offerts par les familles en souvenir de la disparition d’un mari ou d’un fils. Des vitraux racontent un combat (bataille de Loigny à Lanvallay 22, bataille du plateau d’Auvours dans la basilique de Guingamp 22…), une intervention miraculeuse (verrière de la bataille de Saint-Privat à Lanrivain 22) ou un retour ardemment attendu.

En Bretagne, la mobilisation autour du mouvement des zouaves pontificaux, très actifs pendant le conflit, donne lieu à des témoignages identifiables (vitrail à Illifaut 22, coffre d’autel dans l’église de Clayes 35, monument au lycée Saint-Michel de Priziac 56 ou Saint-François-Xavier de Vannes…).

 

Ex-voto à l'issue du conflit de 1870-1871 déposé dans la chapelle d'Ergué-Gabéric (Finistère), © Collection particulière
Ex-voto à l’issue du conflit de 1870-1871 déposé dans la chapelle Notre-Dame de Kerdévot à Ergué-Gabéric (Finistère) © coll. particulière

Dans le contexte de Vœu national et de l’édification de la basilique du Sacré-Cœur à Paris qui suit les événements, de nombreux vitraux et bannières évoquent la dédicace de la France à l’Église (La Guerche-de-Bretagne 35, Lanrigan 35, Elven 56, Esquibien 29…). À Quintin (22), un reliquaire est offert à la basilique Notre-Dame-de-Délivrance. Le 3e bataillon de mobiles d’Ille-et-Vilaine remet à l’église de Cesson-Sévigné (35) un calice et une patène alors que ceux de Moutiers (35) et de Moulins (35) donnent à leur paroisse des tableaux, reproductions d’œuvres de la Renaissance.

 

Quelques objets existent aussi dans les musées bretons (musée des beaux-arts de Quimper, musée de Bretagne, etc.) ; de nombreux autres témoignages de ce conflit oublié existent… Aidez-nous à les identifier. Faites connaitre aussi des archives familiales (photos, journaux de combattants, courriers…) afin d’enrichir la connaissance de cette histoire qui résonne encore étrangement aujourd’hui.