inventaire et valorisation du patrimoine de bretagne

Le caractère pittoresque des centres anciens des villes et bourgs de Bretagne retient souvent l’attention des visiteurs, notamment lorsqu’ils arborent des façades en pan de bois. Bien loin de n’être que des décors, ces architectures anciennes sont aussi des structures fragiles, et aujourd’hui souvent confrontées à bien des difficultés.

Convaincue de la nécessité d’agir pour un aménagement durable et qualitatif de son territoire, la Région Bretagne a engagé une opération d’Inventaire destinée à mieux les connaître pour mieux accompagner des stratégies durables de restauration du bâti et de revitalisation urbaine.

 

Fabriquer la ville de demain sur celle d’hier : redécouverte d’un patrimoine singulier

Maison à pan de bois, Lannion (c) Région Bretagne, Charlotte Barraud

En soutenant des projets s’appuyant sur le bâti ancien, l’objectif est le foncier mais aussi préserver et valoriser un patrimoine diversifié, véritable lien entre les populations et leur territoire, ainsi que des techniques de construction respectueuses de l’environnement.

Les études d’Inventaire viennent en soutien actif de ces démarches en apportant des éclairages précis et documentés à l’échelle locale.

Encore présentes dans une centaine de bourgs et villes en Bretagne, les maisons en pan de bois font partie de ce bâti ancien concerné par les opérations de réhabilitation. Emblématiques, ou parfois très discrètes, elles témoignent sur plusieurs siècles de l’histoire urbaine bretonne comme des techniques médiévales et modernes de charpenterie. Pour composer sa façade, ses niveaux et sa charpente, chaque maison est un assemblage complexe – sans clous ni vis ! – de différentes pièces de bois soigneusement préparées. La pierre est souvent utilisée au rez-de-chaussée ou pour un mur complet : elle établit une barrière contre les remontées d’humidité par le sol et renforce la rigidité de la structure. Les vides des cloisons sont remplis par du torchis, un mélange de terre et de paille. Parfois, les façades sont enduites ou recouvertes d’ardoises. Quand on s’y intéresse, on s’émerveille de la diversité des décors sculptés, de motifs créés par la disposition des bois (en chevrons, en losanges, en grille, etc.) et de mise en couleur variées.

Les maisons en pan de bois sont enfin des modèles d’adaptabilité. Elles s’adaptent aux envies et usages qui évoluent : porches, pièces en encorbellement, façades droites…La taille et l’emplacement des fenêtres se modifie assez facilement, on peut ajouter un étage et bien souvent on reprend le rez-de-chaussée. Et parce qu’elle se compose de matériaux locaux, renouvelables et réparables (bois, terre, paille, pierre), la maison en pan de bois constitue un exemple d’architecture durable !

Pourtant, si l’étude suscite l’intérêt des érudits depuis le 19e s., la connaissance à l’échelle régionale est inégale.

Maison à pan de bois en restauration (c) Région Bretagne, Bernard Bègne

 

Sous la loupe de l’Inventaire, renouveler le regard

L’enquête d’Inventaire du patrimoine urbain en pan de bois que porte la Région depuis 2019, a pour objectif de compléter, renouveler et enrichir les connaissances sur le sujet. Fondée sur un travail de terrain doublé de recherches documentaires, l’étude s’intéresse également aux édifices disparus qui donnent à voir l’ampleur du phénomène « pan de bois » aux siècles précédents et soulignent l’impact des aménagements urbains sur ce type de patrimoine. A l’échelle des villes et in fine à l’échelle régionale, l’enquête propose une vision synthétique de l’architecture urbaine en pan de bois, pour donner à voir les caractéristiques locales comme les traits communs et nourrir les expertises.

La diffusion d’une plaquette de sensibilisation à destination des propriétaires et des collectivités accompagne l’étude. Des actions de médiation sont également régulièrement organisée sur le territoire : une maquette à monter et démonter, une carte géante facilitent la compréhension de ces architectures avec des publics déjà sensibilisés ou totalement néophytes.

 

Partout, faire prendre racine à l’enquête

Journée réseau pan de bois 2024, Vannes (c) Région Bretagne, Amélie Ruellot

Dans le cadre de cette enquête, la Région anime un réseau destiné à renforcer les échanges et synergies. Constitué de collectivités, professionnels du patrimoine, architectes, artisans, associations ou propriétaires, il propose chaque année un temps de partage autour d’expériences et de problématiques liées au sujet du pan de bois.

Encart : Au menu des « Rendez-vous du pan de bois »

– 2019 à Rennes (35) : Tour d’horizon d’expériences, zoom sur la dendrochronologie.

– 2021 à Quimperlé (29) : Aperçu de l’approche archéologique à Angers (49) et présentation de la démarche portée par Quimperlé, ville lauréate du 1er appel à projets.

– 2022 à Auray (56) : La mise en couleur des pans de bois à travers les exemples d’Orléans (45) et de Saint-Brieuc (22).

– 2023 à Saint-Brieuc (22): Quel bois d’œuvre pour les maisons ? En lien avec l’exposition des Archives.

– 2024 à Vannes (56) : Transmettre les savoirs auprès des publics, retours d’expériences.

Un AAP « Révéler et réinvestir l’architecture urbaine en pan de bois », permet d’accompagner particuliers et collectivités pour des projets de connaissance et de réhabilitation de ces maisons. Comme pour tout bâti ancien – mais plus spécifiquement pour du pan de bois – des difficultés non identifiées au démarrage du chantier peuvent compliquer sa réalisation. C’est la raison pour laquelle, la Région Bretagne a choisi d’encourager la réalisation de diagnostics sanitaires portés par des architectes du patrimoine afin d’anticiper au mieux les travaux à venir et des restaurations qualitatives. Plusieurs collectivités s’impliquent dans cette démarche : Quimperlé (29), Malestroit (56) et Vitré (35). Par ailleurs, ce dispositif encourage les datations dendrochronologiques comme à Quimper (29) dans le but d’enrichir le référentiel régional. Autre projet local soutenu dans ce cadre : celui d’un Inventaire participatif de la Ville d’Auray (56), où l’enquête, en plus de la connaissance compilée et partagée, contribue au lien social.

 

15 place Saint-Michel, Quimperlé (c) Région Bretagne, Charlotte Barraud

 

Quimperlé : avancer ensemble pour un résultat d’exception (15 Place Saint-Michel, Quimperlé – 29)

Cachée derrière son essentage d’ardoises, une maison a priori banale place Saint-Michel s’affiche aujourd’hui comme la plus ancienne maison en pan de bois de Bretagne. Cette révélation a été possible grâce à l’action conjointe de la Ville, de la Région Bretagne et la DRAC. L’étude dendrochronologique indique des arbres abattus entre 1394-1409 et le diagnostic sanitaire donne à lire une disposition originale de l’étage, avec une partie sous charpente et une « chambre suspendue », semblable à une maison d’Angers (49) qui lui est contemporaine. Ces nouveaux éléments permettent en 2024 d’étendre la protection au titre des Monuments historiques.

Quimperlé (29) est de nouveau lauréate pour la réalisation d’un diagnostic sanitaire et d’une datation sur la maison du 2 rue Gauguin. De nouvelles découvertes en perspective, qui viendront enrichir la synthèse sur la ville. Découvrez ici les maisons concernées par la démarche de réhabilitation : 8, 10, 12 rue Brémond d’Ars et 15 Place Saint-Michel ainsi que le dossier consacré aux édifices disparus.

 

Découvrir les derniers bourgeons

En 2024, l’enquête s’est poursuivie dans 3 bourgs de la communauté de communes de la Bretagne romantique : Combourg, Hédé et Tinténiac, révélant de nouvelles maisons et des transformations parfois étonnantes. Dans le Morbihan, elle explore aussi Auray et le quartier Saint-Goustan. Ces travaux ont donné lieu à plusieurs temps d’échanges avec les publics, notamment à l’occasion des Journées du patrimoine.

 

Recommandations bibliographiques 

Architectures en pan de bois dans le pays rennais. Un patrimoine insoupçonné (2019) : une publication du service de l’Inventaire de la Région Bretagne qui aborde pan de bois rural et pan de bois urbain, leurs caractéristiques et leurs influences respectives, sur un territoire centré autour de Rennes.

Fanny Gosselin, « Construire et partager l’Inventaire de l’architecture urbaine en pan de bois en Bretagne » dans Bâtir en pan de bois à la campagne et à la ville, XIIIe-XIXe siècles, Clément Alix et Julien Noblet (dir.), Presses Universitaires François-Rabelais, 2024 : p. 192

Clément Alix et Frédéric Épaud, La construction en pan de bois. Presses universitaires François-Rabelais, Presses universitaires de Rennes, 2013.

Alain Nafilyan (dir.), La demeure urbaine à pans de bois, Editions du Patrimoine, 2023.

Daniel Leloup, Maisons en pan-de-bois de Bretagne. Histoire d’un type d’architecture urbaine, ArMen/Le Chasse-Marée, Editions Ouest-France, 2002.