inventaire et valorisation du patrimoine de bretagne

Elle aurait pu rester anonyme, cette femme penchée sur sa pénible tâche si elle n’avait été identifiée par un ostréiculteur voisin à l’occasion d’une enquête d’Inventaire du patrimoine…

Installée à Dinan à partir de 1937, Yvonne Jean-Haffen n’a de cesse jusqu’en 1993 de peindre les paysages et les activités de la vallée de la Rance et de la côte voisine.

Réalisé dans les années 1950-1960 à l’occasion d’une promenade à Cancale, ce tableau décrit un chantier ostréicole. Le rocher de Cancale et le fort des Rimains, au loin, permettent de le localiser au nord de la jetée de fenêtre, là où la plupart d’entre eux sont encore en place.

 

Parc à huîtres, étude réalisée entre 1950 et 1960 – © Musée Yvonne Jean-Haffen – Maison d’artiste de la Grande Vigne (Dinan)

Au premier plan, fichée dans le sable, une balise verticale de bambous ligaturés permet de situer le parc à marée haute. La composition documentaire reproduit les gestes de la préparation des huîtres. L’homme à la marinière rouge prend ou pose une manne d’huîtres dans un bassin de stockage ou vivier. À droite, celui à la marinière bleue, les nettoie dans une manne d’osier placée dans un bassin plus petit. On devine le mouvement de balancier régulier de son geste. La femme effectue le triage à la main des huîtres, en fonction de leur taille. Le dernier personnage, en rouge, remplit mannes et bourriches pour la vente.

 

La mère Panard, une vraie cancalaise, volontaire et le verbe haut

Parce que la pêche à Terre-Neuve mobilisait les hommes de février jusqu’à la fin de l’été, les parcs à huîtres étaient tenus majoritairement par des femmes. Au centre du tableau, avec son tablier jaune, la mère Panard était connue pour son fort tempérament.

À l’occasion de l’enquête d’Inventaire sur le territoire du futur PNR Rance Côte d’Émeraude, c’est Michel Louvet-Hunot sans doute lui-même représenté sur le tableau, à droite, préparant les bourriches, qui l’identifie : « la mère Panard, c’était le surnom de Victorine Leguérinays qui tenait le chantier ostréicole juste à côté de celui de ma famille. Ce sobriquet évoquait sa démarche maladroite, parce qu’elle avait les pieds déformés. Elle avait la réplique et la répartie facile. »

Née Roger en 1890, Victorine a épousé Charles Leguérinays (avec la marinière bleue, à droite sur le tableau). Elle est décédée en 1968.

En même temps qu’il décrit l’activité qui a ancré la notoriété de Cancale et marque de façon si spécifique ce paysage littoral, le tableau d’Yvonne Jean-Haffen a fixé l’image de cette femme.

En 2019, l’enquête d’Inventaire et le témoignage de Michel Louvet-Hunot en raniment la mémoire.

 

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