inventaire et valorisation du patrimoine de bretagne

En donnant à lire les circulations, routes et chemins racontent l’histoire de l’aménagement du territoire. Du 31 mai au 2 juin 2022, le colloque Chemins, mobilités et circulations en Bretagne, de l’âge du bronze à nos jours va porter un éclairage diachronique et pluridisciplinaire renouvelé sur cette histoire.

La lecture de traces patrimoniales permet d’explorer « de l’intérieur » cette histoire et d’inscrire dans les paysages et l’histoire les détails notés sur ces représentations codifiées, et anecdotes – souvent des mésaventures – rapportées par les voyageurs.

 

Comment lire l’histoire des routes ?

Aujourd’hui encore, le réseau routier breton demeure l’héritier d’axes antiques, l’un au nord et l’autre au sud, et d’un tracé organisé autour de deux grands nœuds : Condate (Rennes) et Vorgium (Carhaix) où convergeaient respectivement une dizaine et une douzaine de routes. En plus des voies maritimes, quelques autres nœuds (Nantes, Vannes, Corseul) étaient desservis chacun par 5 à 7 routes.

Le rattachement du duché au royaume de France renforce l’ancrage de la péninsule au reste du territoire, mais comme partout ailleurs, il faut attendre le XVIIIe siècle pour qu’émerge une véritable politique routière. Pour des raisons militaires et stratégiques, la Bretagne bénéficie d’une attention particulière. De grands travaux sont conduits par le duc d’Aiguillon, gouverneur de Bretagne de 1753 à 1770, renforcent les axes antiques, de Rennes à Brest (route n°12) et de Landerneau à Angers (route n°164), et les complètent de nouveaux tracés. Le nœud routier de Pontivy supplante celui de Carhaix mais le maillage du réseau secondaire reste large.

La plaque en zinc au-dessus du passage rappelle que l’ancien relais de Loc Ildut à Sizun (29) se trouve le long de la route nationale 164 (état en 1970). © Service de l’Inventaire du patrimoine, Région Bretagne

 

Si l’économie profite de ces aménagements qui facilitent les liens entre les côtes et l’intérieur des terres, l’augmentation du trafic nuit à l’état des routes : en hiver, de nombreuses portions sont impraticables sur les axes secondaires comme sur les principaux, et plus encore les chemins vicinaux. En 1738, l’instauration des corvées de grand chemin apporte des améliorations.

Un siècle plus tard, en répartissant la charge budgétaire avec les Départements et les communes, la loi de 1836 suscite enfin, pour des raisons électoralistes, des politiques routières réellement investies. Les progrès sont flagrants : en Ille-et-Vilaine, le réseau augmente d’environ 1 000 km entre 1850 et 1873. Il quadruple en Finistère entre 1863 et la fin du siècle, passant de 2 000 km de bonnes voies à 8 000, soit dix fois plus qu’à la Révolution et vingt-cinq fois plus qu’en 1757 ! Les usagers profitent aussi de la construction de nombreux ponts : malgré plusieurs accidents, celui de La Roche-Bernard (1838), d’une portée de 200 m, reste pendant 30 ans le plus important de France. Le pont du Lorois enjambe la rivière d’Étel en 1844.

Construit de 1845 à 1852, le viaduc entre Dinan et Lanvallay permet de franchir la Rance en évitant la très dangereuse et difficile rue du Jerzual. On y accédait préalablement par le pont médiéval de la Madeleine, reconstruit suite aux bombardements du 2 août 1944. © Service de l’Inventaire du patrimoine, Région Bretagne

 

 

Patrimonialisation d’un panneau de signalétique routière à Vildé-Guingalan (22) © Service de l’Inventaire du patrimoine, Région Bretagne

Plaques de cocher et autre signalétique routière

Pour faciliter les déplacements, les Départements ont aussi la charge d’équiper les routes de bornages et de panneaux signalétiques, d’abord sur les axes principaux, puis secondaires. En 1846, un fondeur parisien dépose un brevet pour la fabrication de plaques de fonte en relief, et s’octroie les marchés de nombreux départements. Les « plaques de cocher » (dénomination usitée seulement depuis les années 2000) sont positionnées aux carrefours, sur des poteaux d’environ 2,50 m pour être facilement lues des cochers, ou directement fixées au mur de bâtiments. Leurs mentions indiquent leur lieu d’implantation, la désignation de la route, les indications de distance des communes les plus proches et/ou les plus importantes.

La fabrication des plaques en fonte s’arrête au tournant du XXe siècle avant d’être remplacées par une signalétique plus adaptée à l’automobile. Les panneaux du Touring Club de France apparaissent en 1910, puis les Michelin, avant les panneaux métalliques et enfin les panneaux réfléchissants…

Au fil de ses enquêtes, l’Inventaire a recensé plusieurs plaques de cocher (à retrouver ici), dont l’identification est enrichie depuis mi-2021 par des passionnés de patrimoine routier intervenant comme contributeurs. Chaque détail de ces plaques leur parle : la mention du fondeur, le numéro de la route, la graphie, l’actualisation des mentions en fonction des régimes politiques selon que les routes sont royales, nationales ou impériales au fil du XIXe siècle, la sur-classification ou déclassification d’une voie…  Les inventaires qu’ils réalisent par ailleurs, de façon participative via les réseaux sociaux, pourront également, au fil de leur livraison, continuer à enrichir nos données et contribuer ainsi à la protection de ce patrimoine fragile et peu connu.

 

 

L’histoire des routes en quelques dates :

1576 : ouverture du service de poste aux particuliers

1578 : création de la poste aux chevaux

1680 : création des relais de poste par Colbert

1716 : création du corps des Ponts-et-chaussée (et en 1747 de l’école)

1738 : instauration de corvées de grands chemins

1836 : loi Thiers-Montalivet

 

Sont à découvrir sur les sites de l’Inventaire du patrimoine :

 

Pour en savoir plus :